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François Cheng, rencontre entre pensées chinoise et occidentale


« Dans la vie courante, l’âme d’une personne transparaît dans son regard et s’exprime par sa voix. Deux organes, les yeux et la bouche, qui se concentrent dans un visage, lequel constitue le mystère incarné de tout être humain. Lorsqu’on regarde un artiste faire un portrait, on voit qu’il commence par dessiner un ensemble de contours, pour que le visage « prenne chair » dans un espace. Vient le moment magique où, au moyen de quelques traits, il fait apparaître les yeux. Alors une percée se fait, et on plonge dans une profondeur insaisissable. » Extrait de De l’âme de François Cheng François Cheng est un poète, romancier, essayiste et calligraphe mais avant tout un auteur dont les réflexions spirituelles sur la beauté, la mort ou encore l’âme passionnent, questionnent et transforment. Né dans le Jiangxi au sud de la Chine en 1929, il est issu d’une famille de lettrés. Après avoir étudié à l’université de Nankin, il se rend à Paris en 1948 car son père participe, en tant que spécialiste des sciences de l’éducation, à la fondation de l’UNESCO. En raison de la guerre civile chinoise, sa famille émigre aux Etats-Unis en 1949 tandis que lui décide de s’installer définitivement en France en raison de sa passion pour la culture française. L'auteur traverse donc une longue période d’adaptation marquée par la solitude et le dénuement. Il en profite pour se plonger dans l’étude de la langue et de la littérature française. En 1960, il commence à travailler au centre de linguistique chinoise et entame la traduction de grands poètes français comme Baudelaire. A partir de 1969, il enseigne et mène le début de sa création personnelle. Il a reçu de nombreux prix dont le Grand prix de la Francophonie pour l’ensemble de son œuvre et est surtout connu pour être le premier asiatique à avoir été élu à l’Académie française en 2002, au fauteuil de Jacques de Bourbon Busset. En 1949, ce jeune homme chinois meurtri, exilé et venant d’un pays en guerre civile traversait une crise existentielle et est arrivé avec ses blessures. Pourtant, il est devenu le défenseur et le représentant de la joie, de la vie et de la beauté à travers ses œuvres. Certains de ses titres sont très évocateurs comme Toute beauté est singulière publié en 2004 ou encore Cinq méditations sur la beauté publié en 2006. On peut penser que cela est contradictoire et insensé. Cependant, François Cheng affirme que pour atteindre la vraie joie, il faut passer par la souffrance et par l’expérience de douleurs extrêmes. En raison de sa vision spiritualiste, l’auteur a beaucoup travaillé sur la notion d’âme. Il constate notamment que ce mot a disparu de la vision occidentale et que seul l’esprit est valorisé dans nos sociétés actuelles. Il nous invite donc à remettre l’âme au cœur de notre vie quotidienne et à repenser la question du mal à partir d’elle. Selon lui, alors que l’esprit peut connaitre la déficience voire l’effondrement, l’âme est une entité qui reste toujours entière car elle est reliée au souffle originel. Prendre l’esprit comme critère de valeur serait dangereux. Au contraire, choisir l’âme serait sûr. Pour lui, l’esprit est fondé sur l’intelligence cérébrale tandis que l’âme sur celle du cœur. Comme il le dit « la beauté du monde ne prend sens que lorsqu’elle est appréhendée et intériorisée par une âme humaine ». Dans le domaine de la poésie, François Cheng affecte particulièrement le quatrain, très présent dans la rhétorique chinoise. Il l’utilise notamment dans son ouvrage poétique Enfin le royaume publié en 2018. Il se rappelle : « Ma poésie en français a commencé par un quatrain il y a exactement 60 ans ». On peut se demander comment il parvient à véhiculer autant de poésie mais surtout de sens en seulement quatre vers. Il explique utiliser souvent cette forme car elle lui permet de concentrer ce qu’il souhaite transmettre en 4 temps précis : le commencement, le développement, le tournant et l’ouverture. Il atteste du pouvoir singulier de ce mode d’expression plutôt resserré. Son processus créatif lui demande un réel travail spirituel, un certain dépouillement mais aussi un lâché prise. Il se réveille plusieurs fois dans la nuit pour réfléchir à de nouveaux vers qui naissent subitement dans son esprit. Voici quelques-uns de ses quatrains, qui sait si vous ne vous réveillerez pas cette nuit, emporté par un élan poétique et créateur… « Ne quémandes rien. N’attend pas. D’être un jour payé de retour. Ce que tu donnes trace une voie Te menant plus loin que tes pas. » « Le sort de la bougie est de brûler. Quand monte l’ultime volute de fumée, Elle lance une invite en guise d’adieu : « Entre deux feux soit celui qui éclaire ! »

« Nous avons bu tant de rosées En échange de notre sang Que la terre cent fois brûlée Nous sait bon gré d’être vivants. » Sources: La création d’un quatrain selon François Cheng, vidéo de La Grande Librairie, 30 janvier 2020 François Cheng et son rapport à la joie, vidéo de La Grande Librairie, 16 avril 2020 « Enfin, le royaume ! », l’itinéraire spirituel de François Cheng, vidéo de La Grande Librairie, 23 février 2018 François Cheng nous parle de son dernier ouvrage « De l’âme », vidéo de La Grande Librairie, 18 novembre 2016 Site de l’Académie française, rubrique « Les immortels », « François Cheng » Article d’Anaïs

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